Paris 1er

COPROPRIETE – Une servitude peut-elle s’exercer sur une partie commune à jouissance privative ?


Cass.civ.3, 23 septembre 2021, n° 19-22.556 F-D

 

 

La division d’un immeuble en lots de copropriété n’est pas incompatible avec l’établissement de servitudes entre les parties privatives de deux lots appartenant à des propriétaires distincts (cass.civ.3, 1er juillet 2009, n° 08-14.963 ; cass.civ.3, 30 juin 2004, n° 03-11.562 FP-PBRI ; cass.civ.3, 13 septembre 2005, n° 04-15.742 F-D). Une servitude de passage peut également grever une cour, partie privative d’un lot, au profit d’un autre lot afin d’en permettre l’accès par application de l’article 682 du Code civil (cass.civ.3, 19 janvier 2010, n° 09-12.522).


Par contre, en l’absence de fonds distincts constituant des propriétés indépendantes et appartenant à des propriétaires différents, il y a incompatibilité entre la division de l’immeuble en lots de copropriété et la création d’une servitude sur une partie commune au profit d’un lot privatif (cass.civ.3, 9 décembre 1998, n° 97-13.010). La solution a également été adoptée, en dehors du champ de la copropriété des immeubles bâtis, pour un fonds indivis et un fonds divis dont le propriétaire est membre de l’indivision (cass.civ.3, 12 avril 2018, n° 16-24.708).

 

Une servitude peut-elle être valablement constituée sur une partie commune à jouissance privative ?

 

Dans l’affaire commentée, le règlement de copropriété prévoyait que le lot n° X, comportant la jouissance privative d’une parcelle de terrain commune, était grevé d’une servitude de passage au profit du lot n° Y.

Le propriétaire du lot n° Y a assigné le propriétaire du lot n° X en demandant l’enlèvement sous astreinte des aménagements situés sur l’assiette de ce passage.

 

La cour d’appel accueille la demande du propriétaire du lot n° Y en retenant que l'incompatibilité décrite entre copropriété et servitude par les appelants n'était pas démontrée et qu'ainsi, en détenant la jouissance privative de la parcelle sur laquelle repose l'assiette de la servitude, les propriétaires du lot n° X ont l'obligation de procéder aux travaux nécessaires à l'utilisation prévue par la convention.

 

Au visa de l’article 637 du code civil, la Haute autorité casse l’arrêt rendu en rappelant qu’« une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire ».

Par voie de conséquence, il ne peut, selon la Haute autorité, être constitué de servitude au profit d'un lot privatif sur les parties communes d'un immeuble en copropriété.

La cour d'appel, qui a constaté que l'assiette litigieuse se situait sur une partie commune en application du règlement de copropriété, a donc violé le texte susvisé.

Le droit de jouissance exclusive ne faisait pas perdre aux espaces litigieux leur nature de partie commune.  Une servitude ne pouvait ainsi être constituée au profit d’un lot.

 

 

 


Articles similaires

Derniers articles

IMMOBILIER – Trouble anormal de voisinage

IMMOBILIER – Sur la responsabilité de l’agent immobilier

CONSTRUCTION – Réception de l’ouvrage (non)

CONSTRUCTION – Faute de l'entreprise pour ne pas avoir signalé les risqués liés aux défauts de ses propres ouvrages au regard des travaux exécutés par les autres entreprises

CONSTRUCTION – Quelle sanction pour la non-conformité d’un ouvrage dépassant de 70 cm par rapport à la hauteur prévue au PLU ? Application du principe de réparation intégrale

IMMOBILIER – Sur le devoir de renseignement du diagnostiqueur quant aux travaux réalisés par le vendeur

CONSTRUCTION – Sur les arrêts de revirement rendus par la Cour de cassation en matière d’éléments d’équipements

PROCEDURE CIVILE – Revirement concernant la péremption d'instance

PROCEDURE – Sur la péremption d’instance

CONSTRUCTION – Sur l’étendue de la réparation des dommages causés par les constructeurs et sur l’appréciation des clauses limitatives de responsabilité

TROUBLES ANORMAUX DU VOISINAGE – Sur les conséquences liées à l’antériorité des causes du trouble anormal de voisinage

CONSTRUCTION – Du point de départ du délai de recours entre constructeurs