Paris 1er

COPROPRIETE – Peut-on soulever le caractère non écrit d’une clause du règlement de copropriété dans le cadre d’une instance où le syndicat des copropriétaires n’est pas partie à la procédure ?


 

Cass.civ.3, 10 octobre 2024, FS-B, n° 22-22.649

 

Des copropriétaires peuvent-ils soulever le caractère non écrit d’une clause du règlement de copropriété dans le cadre d’une action judiciaire où le syndicat des copropriétaires n’est pas partie à l’instance ?

 

La Cour de cassation a répondu par la négative dans une décision du 10 octobre 2024, en se fondant notamment sur les dispositions de l’article 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 :

 

"7. Aux termes de l'article 14 du code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée.

8. Selon l'article 43 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, toutes clauses du règlement de copropriété contraires aux dispositions des articles 1er, 1-1, 4, 6 à 37, 41-1 à 42-1 et 46 et celles du décret prises pour leur application sont réputées non écrites.

9. Aux termes de l'article 15, alinéa 1er, de cette loi, le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu'en défendant, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble.

10. Il résulte de ces textes que l'action tendant à voir prononcer le caractère non écrit d'une clause d'un règlement de copropriété n'est recevable que si le syndicat des copropriétaires est appelé à la cause ou entendu.

11. Dès lors que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble dans lequel se situent les lots de Mme [T], de la SCI Logo et de Mme [O] n'avait pas été appelé à la cause ou entendu, la demande tendant à faire déclarer non écrit l'article 21 du règlement de copropriété était irrecevable.

12. Par ce motif de pur droit, substitué à celui justement critiqué par le moyen, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt attaqué se trouve légalement justifié de ce chef".

 

Par ailleurs, il est intéressant de noter que cette décision rappelle la distinction entre action réelle et action personnelle, lesquelles sont soumises à des délais de prescription différents.

Le premier volet de ce litige concernait en effet la supposée appropriation de parties communes par un copropriétaire. La Cour d'Appel avait eu à se prononcer sur caractère prescrit ou non de la demande. Il est rappelé pour mémoire que conformément aux dispositions de l’article 42 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965, qui renvoie à l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq (5) ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. On rappellera également que l’ancien délai était de dix (10) ans avant que la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 (dite loi ELAN) n’aligne le délai de prescription en copropriété sur celui du droit commun. En l’espèce, le délai était de dix (10) ans puisque les faits relevaient de l’ancienne rédaction de l’article 42.

Le délai précité ne vise toutefois que les actions personnelles et non les actions réelles, ces dernières relevant de la prescription trentenaire (cass.civ.3, 6 mars 2002, n° 01-00.335).

La difficulté peut parfois résider dans la qualification de l’action. Ainsi, le recours du syndicat tendant à faire cesser une appropriation des parties communes s’analyse comme une action réelle ayant pour but de restituer ce qu’un copropriétaire s’est indûment approprié (cass.civ.3, 14 février 1996, n° 93-17.667).

Dans les faits relevant de cette affaire, les juges d’appel (Cour d'Appel de Montpellier, 6 septembre 2022, n° 19/05712), avaient constaté que l’état descriptif de division ne mentionnait pas la présence de combles sous la toiture et qu’il n’existait pas, selon les dires de l’expert judiciaire, de combles au sens technique du terme avant les travaux opérés par le copropriétaire assigné. En l’absence d’appropriation de parties communes, l’action intentée devait nécessairement être qualifiée d’action personnelle et non d’action réelle. Dans ce prolongement, la haute juridiction approuve ici les juges du fond en ce qu’ils ont procédé à cette qualification et en ce qu’ils ont retenu que l’action était prescrite.

 

 


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