Cass.civ. 3ème, 5 novembre 2020, n°19-18.284
L’assureur dommages-ouvrage est un assureur de choses qui a vocation à préfinancer le coût des travaux de réparation des dommages de nature décennale par le versement d’une indemnité à son assuré.
Il n’est pas destiné à supporter la charge finale du sinistre et peut exercer un recours à l’encontre des constructeurs responsables de plein droit au regard des articles 1792 et suivants du code civil.
La recevabilité de l’action subrogatoire de l’assureur dommages-ouvrage n’est pas subordonnée au paiement préalable de l’indemnité d’assurance.
La jurisprudence de la Cour de cassation confirme de nouveau cette solution.
Le problème est le suivant. Lorsque l’assuré lui a déclaré un sinistre survenu en fin de garantie décennale et qu’il n’a pas encore pris position sur sa garantie ou payé l’indemnité, l’assureur dommages-ouvrage doit pouvoir préserver ses recours à l’encontre des constructeurs responsables. Cette situation pose une difficulté puisqu'à ce stade de la procédure, l'assureur dommages-ouvrage ne dispose pas encore d'un intérêt à agir au sens de l'article 122 du code de procédure civile. On ne peut pas considérer que ce dernier est subrogé dans les droits de l'assuré puisque l'indemnité ne lui a pas encore été versée comme le prévoit l'article L 121-12 du code des assurances.
Dans ce cas de figure, la jurisprudence admet de longue date la subrogation par anticipation de l’assureur dommages-ouvrage permettant à celui-ci d’interrompre le délai de forclusion alors qu’il n’a pas encore indemnisé son assuré (cass.civ.3, 29 mars 2000, 98-19.505, cass.civ.3, 30 janvier 2008, 06-19.100, cass.civ.3, 7 avril 2015, 14-12.212).
Est ainsi recevable l’action exercée par l’assureur avant l’expiration du délai de forclusion décennale contre les responsables des dommages dont il doit la garantie, bien qu’il n’ait pas eu au moment de la délivrance de l’assignation la qualité de subrogé faute d’avoir encore indemnisé son assuré. Ainsi, l’action subrogatoire de l’assureur dommages-ouvrage peut prospérer pourvu qu'il ait payé l’indemnité due à son assuré avant que le juge du fond n’ait statué (cass.civ.1, 9 octobre 2001, 98-18.378, cass.civ.3, 9 juillet 2003, 02-10.270, cass.civ.3, 10 décembre 2003, 01-00.614, cass.civ.3, du 21 janvier 2004, 02-14.391, cass.civ.2, 16 octobre 2008, 07-19.272, cass.civ.3, 29 septembre 2016, 15-22.187).
Cette solution est rappelée par la 3ème chambre civile dans sa décision du 5 novembre 2020.